Klara a dû arrêter de travailler. Diagnostic : bore out. Le bore out, c’est ce « syndrome d’épuisement professionnel par l’ennui ». Le travail est tellement inintéressant, ou rare, qu’on s’ennuie, on ne se sent pas valorisé, et donc, on perd toute estime de soi, rien n’a plus de sens, on déprime, on est fatigué, on devient irritable, on n’arrive plus à dormir… Evidemment, le corps envoie des signaux d’alarme par tous les côtés. A priori, le bore out est le contraire du burn out, où on a tellement à faire qu’on craque, mais la conséquence est semblable : pendant une longue période de temps, on n’est plus capable de travailler.
Un problème de management
Il semblerait que 15% des employés s’ennuient au bureau. Le Dr Luc Swinnen, qui est une autorité en matière de stress management et de bien-être au travail (www.stressmanagement.be) questionne (article dans Jobat) la responsabilité du management, qui ne prête pas suffisamment attention à ces signaux, et n’est pas attentif à déléguer des tâches intéressantes. Pour lui, un remède consiste dès lors, pour l’employé en bore out, à être assertif et à revendiquer du travail ou du travail plus intéressant. Le problème, c’est que l’énergie manque souvent pour ce faire. Et j’ajouterais que l’on est souvent confronté, en plus, à un conflit de personnes. Devenue « indésirable », la personne en bore out est tenue à l’écart par un responsable. J’en ai même connu à qui on disait de rester chez eux, tout en étant payés. Tout comme le Dr Swinnen, je pointerais d’abord du doigt le management car c’est un poste à responsabilités, y compris celle d’anticiper et de résoudre les problèmes, où que se trouve la « faute ».
Toutefois, la littérature professionnelle et l’expérience
montrent qu’il y a peu de chance de faire bouger le management (le middle
management représentant trèèèèèèès souvent la pire couche d’immobilisme en
entreprise ou en institution). La meilleure solution consiste en fait à partir
de là. C’est ce qu’a fait Klara. Elle et son employeur se sont quittés,
pour reprendre le ton souvent hypocrite des communications d’entreprise,
« de commun accord » et elle est maintenant à la recherche
« d’un nouveau défi ». Enfin, cela, justement, reste à voir.
Car, malgré tous les efforts qu’elle fait pour se remotiver
et se remettre à la recherche d’un travail, Klara n’y arrive pas vraiment. Elle
ne voit rien d’intéressant dans les annonces, ne voit d’ailleurs pas bien quoi
faire et n’a pas d’énergie pour entreprendre grand-chose. De plus, elle subit
la pression de son entourage qui trouve qu’elle est restée suffisamment
longtemps à la maison, qu’elle n’est pas malade, et qu’il serait temps de s’y
remettre.
Changer de vie
Parmi les personnes qui viennent en shiatsu, nous avons
évidemment des personnes qui, comme Klara, et à des degrés divers, font face à
un changement de vie. Ce que bore out et burn out viennent nous dire,
généralement, c’est : il est temps de changer de vie. Sinon ? Il y a
de fortes chances que de multiples maux vont se déclarer, ou que les symptômes
vont s’aggraver. Quand on est en bore out, sans énergie, c’est d’ailleurs qu’on
a déjà nié les premiers symptômes.
Souvent, le médecin, à juste titre, a donné plusieurs mois
(reconductibles) à la maison et, parfois, ces personnes ont entamé une
psychothérapie ou un travail sur soi leur permettant d’explorer ce qui est là.
Il est clair que la première chose à faire, c’est l’éloignement d’un
environnement devenu toxique. En parallèle, il y a la reconquête du temps pour
soi. Avec tous les pièges d’être à la maison, quand il s’agit de femmes, qui
redeviennent des mères au foyer. Ce job-là à temps plein ne leur permet
justement pas de se retrouver. De plus, il y a la pression sociale, comme dans
le cas de Klara, les amis ou la famille qui trouvent qu’il est temps de
retourner travailler. Là aussi, il va falloir la force de dire non.
Les mesures d'urgence : faire le vide et éloigner les toxiques
Le problème, comme au travail, c’est que de la force,
justement, il n’y en a plus dans ces moments-là, pour claquer la porte, prendre
de la distance, mettre des barrières. Il faut absolument du temps, et du temps
rien que pour soi. La personne en bore out est arrivée à un extrême, est
envahie de partout, et il faut expulser les envahisseurs.
Je félicite toujours ceux et celles qui m’avouent leur
préavis de façon un peu honteuse, et je m’en réjouis avec eux : c’est sans
doute une des plus belles années de leur vie. Payés pour se reconvertir,
magnifique ! Ces derniers temps, il y a en plus cette autre pression politique
de l’obligation de travailler, toujours plus, toujours plus longtemps et pour
moins d’argent. Actuellement, il ne surgit plus que des politiciens en costume et
à la mine sombres pour nous dire de travailler et de consommer en oubliant de
vivre. Il est urgent de dire que non merci, et de travailler non pas à la
survie d’un système qui coince de tous les côtés, mais à l’émergence d’un
nouveau système. On me rétorque déjà : il faut bien avoir de l’argent.
Exact, et on attend que se lèvent les vrais réformateurs qui mettront fin au
non-sens ambiant et rendront à l’homme sa dignité, avec la satisfaction de
faire des choses bien rémunérées qui font vraiment progresser l’humanité tout
en préservant la planète.
Il y a nécessité donc de faire le vide, de se tenir à
l’écart d’environnements et de personnes toxiques. Il vaudrait mieux partir
seul(e), un certain temps. Quand on crée de l’espace en soi, uniquement,
quelque chose de nouveau peut surgir. Jamais là où les décombres d’une ancienne
vie encombrent.
Voilà pour les mesures d’urgence.Libérer et reconstruire, avec l'aide du shiatsu
Plus qu'un traitement, le shiatsu est un art de vivre. En pratiquant ou simplement
en recevant le shiatsu, la façon de vivre évolue, on comprend les choses
autrement.
Il suffit de bien regarder le corps pour se rendre compte
que nous ne sommes pas faits pour vivre de façon confinée, assis devant un
écran, les sens émoussés, à faire des choses dont le sens souvent nous échappe.
Nous sommes des coureurs des bois, cela n’a pas changé depuis la Préhistoire,
nous avons besoin d’air, de mouvement. Plus nous sommes sédentaires, plus nous
nous affaiblissons. Nous mangeons trop, et n’importe quoi, cela n’arrange rien.
Et nous sommes perpétuellement bombardés
d’informations inutiles, angoissantes, avec la peur du lendemain.
Pour le bore out comme pour tout, si l’on considère les flux
d’énergie, rien ne sert de s’obstiner dans ce qui bloque. Le perpétuel
balancement du Yin et du Yang vient nous l’apprendre. Lorsqu’une polarité est à
son maximum, l’autre est déjà présente et grandit. Il importe de discerner ce
qui est déjà là et réclame de grandir. Jung parlait déjà de ce type de crise,
qui arrive souvent vers la quarantaine. Il est temps de regarder l’autre
versant et de se demander s’il n’est pas temps de faire autre chose, de faire
moins, de faire autrement ou… de ne plus rien faire (de semblable).
Venir en shiatsu va permettre de libérer et de reconstruire.
Il y aura sans doute un nécessaire passage par le lâcher-prise. On constatera
peut-être que le « kikai », mer d’énergie vitale, est faible, tandis
que le plexus est trop tendu. En d’autres termes, il y a déséquilibre,
tensions, l’énergie est trop haut.
Un bon travail de fond, sur Reins, Foie sera sans doute à sa
place. Et nous n’oublierons pas l’énergie des Poumons, souvent perturbée, à
cause de l’envahissement, parfois même la peau montre des rougeurs. Ce sont des considérations générales, car
chaque personne est différente et on ne peut vraiment juger que sur place.
Tout dépendra aussi du moment. Quand Klara me dit, en
décembre, qu’elle a envie de rester chez elle et pas de courir les entretiens
d’embauche, elle est 100 % à l’écoute de son corps et en harmonie avec
l’énergie ambiante. On n’entreprend pas de grandes choses en hiver, on laisse
monter les idées pour dans quelques mois, quand l’énergie reviendra. Le shiatsu
permet de débloquer, et de déculpabiliser, aussi.
Je n’hésite pas non plus à conseiller de regarder ce qu’on a
laissé de côté dans sa vie : un talent artistique, une activité manuelle,
une aptitude sacrifiée à son métier et à la nécessité de gagner sa vie. C’est
le moment de laisser surgir tout cela. Les longues promenades dans la nature
seront également bénéfiques, par le travail qu’elles accomplissent toutes
seules sur les poumons, les intestins, l’espacement des pensées…
Le shiatsu offre donc une large palette de solutions et permet toute une série de
choses : écoute, lâcher-prise, soin de soi, relaxation, centrage,
stimulation de l’énergie. On met littéralement le doigt sur ce qui ne va pas,
et comme dit Kishi Sensei on enlève les pierres au milieu du ruisseau.
Même si il eût été préférable, dans ce cas comme dans tout
autre, d’avoir commencé le shiatsu « quand tout va bien », car cela
aurait sans doute permis d’éviter la cassure et d’assurer une transition plus
en douceur.
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