Wednesday, 23 July 2025

CORPSESPRIT - Une étude en trois tableaux (1)

TABLEAU 1 - SHINJIN, UN SEUL MOT POUR LE DIRE


CORPSESPRIT. 

Faute de frappe ? Non. Néologisme ? Non plus. Un fait exprès, alors ? Oui, nécessité par le manque de mots adéquats que nous avons en français pour décrire une réalité profonde.

Car votre cerveau a bien distingué deux mots inhabituellement accolés , ‘corps’ et ‘esprit’, correspondant à des concepts bien distincts chez nous. Il y a le corps, cette enveloppe matérielle, il y a l’esprit qu’on ne voit pas. Et nous sommes comme la cohabitation  des deux (cohabitation forcée, selon certains qui se croient de purs esprits) et ces deux-là vivent leur vie comme ensemble mais séparés.

LAT. Living apart together


En Occident, on nous a enseigné à voir les choses ainsi. Vision passéiste qui remonte à quelques philosophes grecs anciens, amplifiée par la vision chrétienne du rejet du corps, remise au mauvais goût du jour par les souvent si peu lumineuses Lumières et qui s’accroche à nos (in)compréhensions dualistes, qui veulent à tout prix définir et catégoriser. La tête invente des narratifs qui lui plaisent, en d’autres termes : se raconte des histoires. 

Penser n’est pas (p)ressentir, pratiquer permet de (p)ressentir


Quand on dit ‘nous créons le monde que nous voyons’, c’est juste. Chacun vit dans son monde : les croyants, les athées, les politiciens, les diplomates, les dictateurs, les riches, les pauvres, les intellectuels, les manuels, les habitants des montagnes, des vallées, des bords de mer, et ainsi, à l’infini… tous ces groupes communiquent plus ou moins et chacun prend ses croyances sur le monde pour la réalité ultime (ça irait passablement si certains ne cherchaient pas à imposer leur vision aux autres).

Corpsesprit est un exemple parfait de ce qui se joue là (au sens de lîla, le jeu divin discerné par les Hindous). Il suffit de changer de plan et de nous rendre sur celui du ressenti profond pour nous rendre compte que notre poildecultage (comme disait mon premier patron, mot qui signifie : ‘couper les poils de c… en quatre’) est un obstacle au ressenti profond du Vivant.

La Voie pour avancer est la suivante : arrêter de ratiociner et explorer, expérimenter. Pratiquer, pratiquer, pratiquer ! Je ne peux parler que de la Voie que je parcours. Et donc, le Shiatsu nous fait toucher corpsesprit. Juste en posant les mains. Sur le corps.

A notre décharge, ici, en Occident, nous avons fort heureusement bien avancé sur les concepts locaux, mais tout cela reste quelque peu confidentiel. Physiciens, astronomes, biologistes, thérapeutes, mystiques… ont eu des compréhensions bien plus riches et plus fascinantes que la compréhension classique et qui font s’émietter peu à peu le monolithe dogmatique des croyances que les profs nous assènent sur l’Univers, la Terre et le Vivant. Restons calmes, et patients : il n’y aura sans doute pas d’avancée décisive sur ce plan de notre vivant.

Car, comme le souligne Eric Baret, ‘notre vieille tradition judéo-chrétienne nous fait penser en termes de pensée et de sens. Ce sont de vieilles mémoires. Il n’y a pas d’esprit et de corps, il n'y a pas deux, il n’y a pas vous ou votre corps. Si vous pensez qu’il y a vous ou votre corps, vous allez finir à l’hôpital psychiatrique’.

L’Un, à la base de la pensée de l’Orient, un autre focus


En Orient, la conception de l’Univers et de l’Homme entre Ciel et Terre est depuis bien longtemps très différente. On ne passe pas son temps à tout séparer et distinguer, sauf pour des raisons explicatives pratiques. On considère que tout ne fait qu’un et que tout est en interrelation. Avec de grandes divergences de vue sur ce qu’est la Réalité, l’illusion, la dualité ou la non-dualité. A nouveau, tous ne voient pas la même chose, mais disons que la vision orientale, globalement, est en amont de la nôtre, plus proche de la Conscience universelle à la base de toute la Manifestation.

O (le Non-Manifesté inconcevable) se révèle dans Un (Il y a le Non-Manifesté) qui engendre Deux (YinYang) qui engendre Trois (Ciel Homme Terre) et à partir de là, les 10.000 Etres (nombre symbolique pour dire ‘tout ce qui existe dans l’univers’).

En Orient, le regard se pose donc principalement sur 0-1-2-3 et puis il y a tout le reste. En Occident, nous partons de 10.000 (que nous continuons encore à disséquer jusqu’à l’infiniment petit) et nous remontons, pour certains, (très lentement) le courant.

Cela se voit également dans le CORPSESPRIT qui nous occupe ici. Il y a un seul mot pour le dire, SHINJIN, mais il y a quatre façons d’écrire ce mot, avec des acceptions différentes. On peut ressentir l’Unité, et on peut analyser les différents sens qu’elle offre.  

Quelle est la meilleure approche ? Les deux.  Il suffit d’être capable de voir qu’il y a les deux et qu’elles mènent à des compréhensions et des applications bien différentes. Inclure, ne pas exclure. Expérimenter, ne pas projeter. Se placer en amont des croyances, des représentations, voire conditionnements, culturels. Observer largement. Et, avant tout, toucher.

Toucher pour se passer de penser, et pressentir


Je disais : ma Voie, c’est le Shiatsu. En tout premier, je pose les mains, je touche. Et l’expérience me dit que par le toucher de ce que je vois comme des corps, mes receveurs(euses) et moi accédons au domaine de l’esprit. Donc, corpsesprit n’est pas un concept, c’est une réalité agissante.


Mais attention aux fantasmes. Eric Baret (250 questions sur le yoga) nous dit à propos de certains mots très souvent employés dans nos cabinets : ‘Il faut finalement oublier ces mots énergie, vibration, lumière, qui sont des imaginaires, et se donner à l’exploration tactile. Cela devient une expérience, un vécu, et non pas ce qui a été appris étudié dans les livres. Il faudrait presque se débarrasser de ces mots. C’est une évidence d’un vécu qui s’impose. Les mots énergie, présence, lumière ne veulent rien dire, ils pointent vers une direction. Ils pointent poétiquement vers l’indéfinissable.

La Vie en son ensemble et en son essence est indéfinissable, trop vaste et trop complexe pour être ramenée en mots. Seule l’exploration tactile nous permet de pressentir l’indéfinissable’. Et il ajoute : ‘Notre approche expérimentale vise un saisissement profond, on ne donne pas une explication de l’inexplicable’.

En effet. Expérimenter, pressentir, être saisi par l'émerveillement. La Beauté, la poésie de l'Univers éclairent la Voie. C'est ce vers quoi pointe la pratique du Shiatsu. Il suffit de poser les mains. 



Penser pour nourrir la recherche


S'il vaut mieux se taire, fin du débat, alors ? Pas la peine de disserter sous peine de masturbation cérébrale collective ?

Oui, et non... Ce mental, malgré sa nature envahissante, sert à quelque chose. Il convient de le laisser à sa juste place, tout en l'honorant et en le nourrissant. Il n'y a pas de combat à mener contre lui.

La réflexion peut amener un regard sur la pratique qui va nous aider à chercher dans la bonne direction. 

Dans les deux prochains articles, je vous emmène donc à la découverte et à l'analyse des quatre façons d'écrire SHINJIN, quatre étymologies avec des sens profonds qui vont enrichir notre compréhension profonde et éclairer notre regard sur notre pratique.







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